jeudi 14 août 2014

Où en est-on avec les boites noires du MH17 ?


Jeudi 17 juillet, un avion de ligne de la Malaisia Airlines, le vol MH17 s’écrase dans l’Est de Ukraine, dans une zone où les combats avec les séparatistes font rage. Il avait à son bord 298 passagers et membres d’équipage dont une majorité de Hollandais et un grand nombre d’Australiens.
Le 18 juillet, la BBC annonce, sur la foi d’un correspondant à Kiev, que les services de sécurité ukrainiens ont confisqué les enregistrements des conversations entre les contrôleurs aériens et l’équipage du Boeing malaisien.
Ce même 18 juillet, le New York Times, « porte-voix» du gouvernement américain annonce que le gouvernement des Etats-Unis a conclu que l’avion abattu au dessus de l’Ukraine l’a été par un missile sol-air de fabrication russe et très probablement fourni par la Russie aux séparatistes de l’Est de l’Ukraine. Au lendemain de la catastrophe, et avant toute enquête, le scénario est déjà prêt.
Le 19 juillet, le gouvernement allemand annonce, dans un communiqué que la chancelière Angela Merkel et le président russe Vladimir Poutine sont tombés, d'accord cours d'un entretien téléphonique, pour qu'une enquête internationale et indépendante sous la direction de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale ait lieu pour élucider le crash aérien en Ukraine.
Ce même 19 juillet, le gouvernement ukrainien annonce qu’il a la preuve que la Russie a fourni le missile qui a abattu le Boeing. L’annonce est relayée par le New York Times. Dans une conférence de presse, Vitaly Nayda, directeur des services de sécurité ukrainien présente une photo du lanceur prise, selon lui, dans une zone contrôlée par les séparatistes. Il sera rapidement prouvé que la photo a été prise loin du lieu supposé, dans une zone contrôlée par l’armée ukrainienne. Le New York Times ne mentionnera pas cette correction, évidemment.
Le 20 juillet, le secrétaire d’état John Kerry déclare : « Il est clair qu’il s’agit d’un système (les missiles) qui a été transmis par la Russie aux mains des séparatistes. Nous savons avec certitude, avec certitude (sic), que les Ukrainiens n’avaient pas un tel système dans cette région à ce moment, ce qui désigne clairement les séparatistes ». Et il déclare à peu près la même chose dans cinq émissions de télévision américaines auxquelles il participe le même jour. On notera, pour mémoire, comme le fait remarquer le journaliste américain John Parry, qu’il s’agit du même Kerry qui le 30 août 2013 déclarait avoir la preuve formelle que le gouvernement syrien était responsable de l’attaque aux armes chimiques du 21 août. Preuve qui n’a jamais été produite et qui a même été infirmée plus tard.
Le 21 juillet, le Ministère de la défense de la Fédération de Russie présente sa version des faits. Et il ne s'agit pas que d'une version. Cartes satellites à l'appui avec explications et trajectoires, deux généraux montrent à la presse que l'avion a dévié de 14km de son corridor de vol et lorsqu'il a tenté de le reprendre, il a été abattu, qu’une batterie BUK est apparue dans la zone proche des combattants, détectée ensuite côté ukrainien, puis a totalement disparue, qu’un autre avion, probablement un chasseur SU25 ukrainien, a été détecté à distance de tir de l'avion de ligne, enfin qu’un satellite américain était orienté sur la zone de combat juste au moment du tir.
Le 22 juillet, le Conseil de Sécurité de l’ONU vote, à l’unanimité, la résolution 2166 qui exige la tenue d'une enquête multilatérale et indépendante sur la tragédie « en conformité avec les principes qui régissent l'aviation civile internationale ».
La représentante permanente des États-Unis à l'ONU Samantha Power déclare que l'avion a probablement été abattu par un missile de type « sol-air », avant d’expliquer qui les séparatistes ne disposent pas de ce type d’arme et que l’armée de Kiev n’a pas mené de tirs de missiles le jour du crash du Boeing 777. Suivez mon regard…
Ce même 22 juillet, Marie Harf, porte-parole du département d’état américain admet que les « preuves » de la responsabilité russe viennent principalement des réseaux sociaux. Ainsi donc, comme le fait remarquer Daniel McAdams de l’Institut Ron Paul, « cela veut dire qu’avec un budget vraisemblablement supérieur à 100 milliards de dollars, la communauté du renseignement américaine base des décisions qui pourraient mener à une guerre nucléaire, sur des Tweets et des vidéos YouTubes de simple citoyens ! »
Mais un peu plus tard dans la journée, des représentant des services secrets américains reconnaissaient qu’ils n’avaient pas de preuve directe de la participation de la Russie. Robert Parry citait même une de ses sources dans les services de renseignement américains qui lui a dit qu’une photo en leur possession montrait une batterie de missiles « BUK » dans la région d’où aurait pu venir le tir, servie par des militaires en uniforme ukrainien. Le département d’état devait d’ailleurs modifier ensuite sa position en déclarant que le missile avait vraisemblablement tiré par un « déserteur » de l’armée Ukrainienne…
En Ukraine, c’est aussi le 22 juillet que les séparatistes ont remis le deux boites noire du vol MH17 à des représentants de la compagnie aérienne. Elles devaient être remises à l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale, mais elles iront finalement en Grande Bretagne pour y être analysées.
Dans les médias européens on aura tout lu et tout entendu, jusqu’au quotidien britannique « The Guardian » qui laisse la parole, dans une tribune à une membre des Pussy Riot qui accuse les médias russes « de couvrir la complicité de Poutine dans la tragédie MH17 ». On notera au passage que les médias russes n’ont pas fait preuve non plus de beaucoup de retenue…
Mais depuis trois semaines, plus rien à propos des boites noires du vol MH17. Elles sont en Angleterre, remises par des officiels hollandais qui, eux-mêmes les avaient reçu de la compagnie malaise à qui les séparatistes ukrainiens les avaient données le 22 juillet. Les officiels hollandais avaient déclaré qu’elles étaient un peu abîmées, mais semblaient en bonne état et exploitables.
Beaucoup de commentateurs avaient fait remarquer que la Grande Bretagne n’était peut-être pas le pays le plus neutre dans cette affaire. D’autres faisaient valoir que c’était des scientifiques qui allaient analyser le contenu des boites et que l’on pouvait faire confiance à leur conscience professionnelle.
Je ne sais quel parti prendre à ce propos. Ce qui me semble certain, en revanche, c’est qu’au moins deux pays sont au courant de la vérité sur l’attaque du vol MH17 : les Etats-Unis et la Russie. L’Ukraine est actuellement surveillée par tout ce que ces deux pays ont comme moyens surveillance et d’espionnage dans la région. Les preuves sous forme de photos satellites, enregistrements d’activité radar et autres, existent. Je soupçonne la France d’être capable d’avoir aussi des informations à ce propos.
Les Russes ont donné certaines information précises (mais sans doute pas toutes celles à leur disposition) et ont posé des questions non moins précises à leur homologues américains. Ces derniers n’ont pas fourni de réponses à ces questions et aucune preuve matérielle crédible (autre que les réseaux sociaux) alors qu’ils en ont. Les services secrets n’aiment pas divulguer d’informations trop précises de peur de dévoiler par la même occasion la qualité de leurs moyens d’observation.
Il est donc à craindre que l’on n’en sache pas beaucoup plus sur le MH17 que sur le MH370 qui, lui, n’a même pas été retrouvé.
Il ne nous reste donc qu’à chercher à qui profite le crime. La campagne médiatique anti russe qui s’est déchaînée après l’accident et qui était prévisible, me semble exclure ce pays de la liste. Les Américains s’ils les détenaient auraient certainement sauté sur l’occasion trop belle et montré des preuves de la complicité russe, comme celles utilisées par le ministère russe de la défense. Mais rien, pas de photos satellite, pas d’enregistrements de la tour de contrôle et maintenant rien à propos des boîtes noires. Etrange…
Doit-on lier à tout ceci le fait que l’on ait « démissionné » avant-hier Andriy Paroubiy, secrétaire du Conseil de la sécurité nationale et de la défense ukrainien et fondateur, avec Oleh Tyahnybok du “Parti Social-Nationaliste d'Ukraine” ?

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