jeudi 9 octobre 2014

Mme. Federica Mogherini devant le “Soviet Suprême”


Je sais, c’est un peu « facile ». J’ai d’ailleurs hésité avant de me permettre ce titre sensationnaliste et un tantinet racoleur je dois bien l’admettre. A chacun sa façon d’évacuer les excès de stress. Il y a ceux qui s’énervent, crient, hurlent émettent des grossièretés. Il y a ceux qui « prennent sur eux », des candidats à l’ulcère et autres joyeusetés. Je préfère l’ironie, même si elle est parfois un peu grinçante.
Donc lundi, Mme Mogherini qui succède à Lady Ahston passait son examen devant le Parlement Européen. Si vous vous souvenez bien, sa candidature à la succession avait été un temps discutée car on la soupçonnait d’être trop « neutre » vis à vis de la Russie. En effet, n’avait-elle pas prôné un certain dialogue avec le « diable ». On l’a d’ailleurs vue lui serrant la main (photo). C’est dire.

Que s’est-il passé dans les couloirs feutrés de la commission, quels compromis ont-ils été élaborés, quelles garanties a-t-elle dû donner pour finalement obtenir ce poste ? Je ne suis évidemment pas dans le secret des dieux de l’olympe bruxellois. Je ne peux que constater que pour son entrée en matière, cet examen de passage devant le PE, elle n’a pas lésiné. Elle a parlé, rien moins, que d’un recours à la force armée. Pas mal pour un début, non ? Attention, c’était pour ajouter qu’une telle intervention ne serait pas nécessaire… Alors à quoi bon le mentionner, me direz-vous. Peut-être n’est-elle pas encore complètement entrée dans le moule bruxellois. En s’entendant parler comme il se doit en ce cénacle, elle a peut-être pris peur et s’est rétractée. Qui sait. Ce genre de réflexes stupides devrait lui passer rapidement. En tout cas si elle veut garder sa place.
Pour le reste, un sans faute !
Oui, il faut maintenir les sanctions et il faut même que tous les pays ne fassent qu’un derrière Bruxelles. L’EU semble avoir pour les sanctions la même passion que les médecins de Molière pour la saignée. Pensez, depuis 2003 ils ont introduit des sanctions contre la Birmanie, contre la Biélorussie, contre la Libye, à deux reprises contre l’Iran, contre la Syrie.
Qu’est-ce donc que ces pays qui demandent la levée des sanctions au motif que leur économie en souffre. Je vous demande un peu. Après tout, l’économie n’est pas le secteur de Mme. Mogherini. Son secteur c’est la politique étrangère. Au fait, la politique étrangère d’un ensemble qui n’a pas de politique étrangère (au sens d’unique et de cohérente), c’est quoi ? A moins qu’il ne s’agisse d’être la porte parole en Europe de la politique étrangère du patron américain. Celui dont le vice-président déclarait devant un parterre d’étudiants à Harvard en fin de semaine dernière que les pays européens ne voulaient pas appliquer les dernières sanctions, mais que le président Obama avait su trouver les arguments pour les forcer à le faire.
La déclaration de M. Biden à Harvard comportait d’autres « perle », des choses qu’un vice-président américain ne peut pas dire, même quand il les pense. Il a donc dû appeler quelques dirigeants de pays du Moyen Orient dont il avait mis la loyauté en doute, pour s’excuser. Il n’a pas cru bon d’appeler l’UE pour le faire. A chacun sa place dans la hiérarchie américaine, n’est-ce pas ?
Alors, à quoi pense l’ambassadeur de France en Russie qui déclare à des journalistes à Ekaterinbourg : « Nous espérons sortir de ce cycle des sanctions dans un avenir proche. Et nous sommes venus ici pour nous préparer au moment, où il sera possible de mettre intégralement en œuvre la machine de la coopération franco-russe ». Nous savons tous qu’un ambassadeur ne prendrait pas la responsabilité de ce genre de déclarations. Ce qu’il dit publiquement, il le dit au nom de la France et donc il doit avoir l’accord du quai d’Orsay avant de parler.
On n’ose penser à un éventuel « réveil » français. En plus, il est trop tôt pour le faire. Et puis, ce n’est pas sans risques et ce n’est pas dans le caractère du président actuel. Mais tout de même, la France n’a pas renoncé à livrer le premier Mistral, malgré les « fortes pressions » du partenaire américain (cher partenaire). Malgré ce que cela a, peut être, coûté à la BNP. Bon, c’est vrai, on a fait mine de se « coucher » un temps, mais c’était pour ne pas gâcher la belle fête de cette rencontre de l’Otan au Pays de Galles. C’est vrai, quoi, il est plus facile d’être seul contre tous quand, justement, ces « tous » ne sont pas physiquement en face de vous.
Maintenant on vient nous faire miroiter un hypothétique gros contrat d’armement avec la Pologne si on ne livre pas le second bateau. Mais depuis qu’elle est indépendante, la Pologne a toujours acheté son armement aux américains. On nous prend vraiment pour des demeurés ou quoi ?
Comme disait M. Chirac, « les ennuis volent toujours en escadrille » (je ne suis d’ailleurs pas sur qu’il n’employait pas un terme un peu plus « percutant »). Après la BNP, le Mistral, des dirigeants de grandes entreprises françaises qui déclarent qu’ils continueront à faire des affaires avec la Russie comme d’habitude ou presque, voilà que la commission prépare des remontrances à propos du budget 2015 de la France et parle même de sanctions (tiens encore ?) financières de plusieurs milliards d’euros. On a déjà tellement de mal à faire des économies, ils nous en veulent à Bruxelles ?
Tout ceci est-il dû totalement au hasard, après les déclarations de notre ambassadeur, celles un peu antérieures de M. Chevènement et notre obstination à tenir notre parole vis à vis de nos clients ?
La France n’est pas la seule à souhaiter ouvertement une fin des sanctions. D’autres pays l’on fait avant elle, comme la Tchéquie. Mais ces pays n’ont pas le même poids économique et symbolique dans l’UE. Si la France devait un jour prendre ses distances avec l’Europe de Bruxelles (pas l’Europe en général, bien sûr) et, pourquoi pas, l’euro, c’en serait sans doute fini de ces deux constructions. Le message de Bruxelles est donc clair, « en rang et je ne veux voir qu’une seule tête » !
Ceci me ramène à la remarque de M. Biden. Il a dit, dans son discours que « les Européens » ne voulaient pas appliquer ces sanctions et le président Obama, etc. Mais de qui parlait-il vraiment ? Des Européens comme un ensemble de pays pris globalement ou de l’Union Européenne, c’est à dire de Bruxelles ? Je pencherai pour la première solution et c’est pourquoi il n’a pas cru bon d’appeler pour s’excuser. Il sait, nous savons, Bruxelles évidemment sait que les fonctionnaires de Bruxelles étaient prêts à appliquer ces sanctions. Ce sont les pays qui ont un peu renâclé. Ils avaient déjà pu constater les effets négatifs des sanctions sur leurs propres économies. Et puis, les dirigeants des pays européens ont de lourdes responsabilités devant leurs électeurs. En particulier il faut absolument faire redémarrer ces économies en panne depuis si longtemps. Et puis, la Russie est un énorme client et en matière de commerce, les places perdues sont difficiles à reprendre.
Un fonctionnaire européen n’a pas ce genre de problème. Où sont ses électeurs ? Mais il lui faut absolument préserver l’UE. Il s’agit de sa carrière, on ne rigole pas avec ces choses là. Les dirigeants de Bruxelles ont choisi leur camp, celui du bassin atlantique. Ils étaient donc prêts, sans états d’âme à appliquer les nouvelles sanctions et ne se sont donc pas sentis visés par les remarques de M. Biden. Et l’honneur de l’Europe, me direz-vous ? Les citoyens européens ne se reconnaissent pas dans l’UE, pourquoi demander aux fonctionnaires de Bruxelles de le faire. Et en ces périodes de chômage…

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